La Fédération des vins d’origine EFOW sous son acronyme anglais, semble avoir toujours fait partie du panorama du lobbying européen. Pourtant, ce qui aujourd’hui semble être une évidence, est un projet innovant lancé il y a à peine 5 ans par des associations viticoles nationales cherchant à mieux se défendre à Bruxelles. Retour sur 5 années très riches qui ont transformé EFOW en acteur incontournable de la scène viticole européenne.
Bruxelles, 2008. Marianne Fischer Boel, la Commissaire européenne à l’Agriculture d’origine danoise annonce un projet de réforme ultra-libérale qui attaque frontalement les vins d’origine : libéralisation des droits de plantation, arrachage massif du vignoble, suppression de la chaptalisation, fin de la distillation de crise et de l’aide au moût concentré, nouvelle segmentation entre vins avec IG (AOP et IGP) et Vins Sans IG (VSIG), reconnaissance des IG par la Commission et non plus les Etats Membres etc. C’est un coup de tonnerre pour la viticulture européenne. Dès le début, des divisions et des tensions entre les pays producteurs apparaissent, chacun choisissant sa priorité. A cela s’ajoute l’impossibilité pour la principale organisation de la production de trouver un accord entre ses membres et un négoce organisé proche de la Commission. Sans structure à Bruxelles, la voix des vignerons d’origine se fait difficilement entendre. Malgré tout, au prix d’efforts considérables la viticulture réussit à sauver l’essentiel dans un contexte particulièrement hostile : maintien de la définition de l’AOP, prolongation de 2 ans des droits de plantations, rapport d’étape de la Commission en 2012 etc. Ce sauvetage in extremis agit comme un déclencheur et fait prendre conscience aux uns et aux autres que l’avenir de la viticulture se joue désormais à Bruxelles. Dans un processus décisionnel complexe, il n’est plus question de faire cavalier seul.
Etre ensemble pour peser
Pour éviter qu’un épisode semblable se reproduise, la CNAOC, la Federdoc (vins italiens d’origine), la CECRV (vins espagnols d’origine) et l’IVDP (vins de Porto) décident de se structurer pour faire entendre la voix des IG viticoles en Europe. Ils constatent que leur dispersion a permis à la Commission de diviser pour mieux régner. S’ils sont unis, cette tâche sera beaucoup plus ardue. C’est ainsi qu’EFOW, la fédération européenne des vins d’origine voit le jour en 2010. Son objectif : défendre et promouvoir le concept d’IG en viticulture.
Pour être efficace sur le terrain européen malgré ses moyens limités, EFOW choisit ses batailles et la première sera la défense du vin rosé. Face – comme d’habitude – à la Commission européenne qui veut libéraliser la façon de produire du rosé en autorisant le mélange de vin rouge et blanc, EFOW lance à l’occasion des élections européennes une campagne percutante autour du message « couper n’est pas rosé » et tue le projet dans l’œuf. L’union des vignerons d’origine sur la scène communautaire est définitivement lancée.
S’ensuit alors le long et difficile combat contre la libéralisation des droits de plantations. Les défis sont de taille : trouver un texte pour insérer la demande de maintien des droits de plantation, persuader la Commission de revenir sur une décision prise en 2008 et convaincre une majorité d’États membres et de parlementaires. Petit à petit, à force de pugnacité et de détermination, l’impossible se transforme en possible : le texte sera la nouvelle réforme de la PAC, le Commissaire à l’agriculture Dacian Ciolos écoute les arguments des vignerons et crée un groupe de discussion à haut niveau, les États membres producteurs et en particulier la France se mobilisent à travers une plate-forme politique et le Parlement européen défend avec intransigeance la viticulture européenne. Grâce à une mobilisation sans précédent des vignerons partout en Europe, le système des autorisations de plantations de vigne remplace celui des droits de plantation. La viticulture est désormais le dernier secteur agricole en Europe à garder la maitrise de son potentiel de production grâce à cet outil de régulation.
Défendre les IG à l’international
Cette victoire d’ampleur a solidement installé EFOW dans le paysage communautaire. Aujourd’hui encore, la fédération continue de défendre avec vigueur le concept des IG. Elle se bat depuis sa création pour une meilleure prise en compte des IG dans le commerce international. Une meilleure reconnaissance dans le cadre des accords commerciaux bilatéraux négociés par la Commission européenne et sur Internet. Dernière réussite en date : faire respecter les IG sur internet dans la cadre du lancement des nouvelles extensions « .WINE » et « .VIN ». Une victoire obtenue après 3 années de combat, grâce notamment à l’union autour d’une même cause des vignerons américains et européens, une première dans l’histoire viticole. Cette décision marquera pendant les années à venir les détracteurs du modèle des IG. Enfin, il ne faut pas oublier les autres dossiers qui mobilisent EFOW tout aussi importants même si moins médiatisés : la défense de mentions traditionnelles, l’exemption d’étiqueter les ingrédients et calories, les nouvelles mesures dans les programmes nationaux, l’inclusion du vin dans les programme de promotion des produits agro-alimentaire UE et bien d’autres dossiers.
EFOW en est un nouvel exemple : sur la scène européenne comme sur la scène nationale, c’est l’union qui fait la force pour la filière viticole.
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