Etiquetage des calories et des ingrédients

Commission Européenne, Etats Membres, consommateurs… A Bruxelles, la pression est de plus en plus forte sur le secteur des boissons alcoolisées pour lui imposer l’étiquetage des calories et les ingrédients. A tel point que certains opérateurs ont déjà commencé à étiqueter ces informations. La filière viticole s’inquiète de ce contexte.

Daniela Ida Zandonà préfère présenter les choses telles qu’elles sont : « Il est aujourd’hui très difficile d’imaginer de maintenir les exemptions dont nous bénéficions et quasiment impossible d’éviter un étiquetage supplémentaire…» La déléguée générale d’EFOW, la fédération européenne des vins d’origine (dont est membre la CNAOC) connait bien les arcanes de Bruxelles. « Certes, ce sujet revient sans cesse sur la table depuis de nombreuses années. Mais aujourd’hui le contexte a changé : certaines filières de boissons alcoolisées étiquettent déjà, le Parlement et un nombre important d’Etats membres y sont désormais favorables et les organisations de consommateurs sont de plus en plus offensives sur le sujet…» Aujourd’hui les boissons alcoolisées sont le dernier produit alimentaire préemballé à ne pas devoir étiqueter les ingrédients et les calories. Alors, la fin de l’exception est-elle arrivée ?

                 L’ÉTAU SE RESSERRE

En mars 2017, après avoir repoussé l’échéance pendant plus de deux ans, la Commission Européenne publie finalement son rapport sur l’étiquetage des boissons alcoolisées. Elle donne un an à l’ensemble des filières de boissons alcoolisées pour proposer une solution d’autorégulation. « La Commission était dans une impasse et a décidé de lancer la balle dans le camp du secteur. De fait, étant donné les divisions du secteur des boissons alcoolisées, elle nous met face à un challenge difficile.» analyse Mme Zandona. En effet, considérant que la décision d’étiqueter les calories et les ingrédients comme déjà actée, certains grands groupes comme Diageo ou Heineken souhaitent anticiper et étiquettent déjà les calories. L’organisation The Brewers of Europe qui représentent surtout les grands acteurs de ce secteur a également annoncé un objectif ambitieux de 80 % des bières avec l’étiquetage des informations nutritionnelles et des ingrédients d’ici à 2018 (NB. Il faut noter que beaucoup de petits brasseurs ne partagent pas cet enthousiasme). A cela s’ajoute la pression des pouvoirs publics européens et de la société civile. Plusieurs Etats Membres comme la Belgique et l’Irlande sont prêts à avancer au niveau national sur le sujet, si la Commission européenne n’avance pas assez vite. Au Parlement Européen, depuis les élections européennes de 2014, une majorité de députés est désormais en faveur de l’étiquetage des calories et des ingrédients. Enfin, les associations de consommateurs profitent de ce contexte favorable pour pousser une position qu’ils défendent depuis de nombreuses années. L’étau se resserre progressivement.

                 TROUVER DES PISTES DE SORTIES

« Informer le consommateur n’est pas le rôle exclusif de l’étiquette qui est aussi un outil marketing » commente Bernard Farges, président d’EFOW. « Le vin est un produit vivant qui ne correspond pas une recette. Pour les nombreuses PME de la filière, étiqueter les additifs serait tout simplement trop compliqué au niveau administratif ! » ajoute-t-il.  Pourtant, à plusieurs reprises, la Commission Européenne a signifié à la filière viticole qu’elle attendait une proposition d’autorégulation ambitieuse, sous peine si ce n’est pas le cas d’aligner les règles d’étiquetage du vin avec celles des autres produits alimentaires. Pour M. Farges, « La Commission européenne doit admettre que si la filière viticole n’a rien à cacher et est prête à donner plus d’informations au consommateur, il faut tenir compte des spécificités de notre filière, de la structure de ses entreprises et des problèmes de traduction qui pourraient se poser

Alors comment trouver une porte de sortie ? « Il s’agit d’information du consommateur et pas nécessairement d’étiquetage » explique Mme Zandona. L’idée serait de renvoyer sur l’étiquette à un site internet sur lequel figureraient des informations sur les calories voire sur les ingrédients. Une proposition qui permettrait à la fois de donner des informations aux consommateurs et d’éviter des frais de gestion trop lourd. La filière viticole a désormais jusqu’à mars 2018 pour faire une proposition d’autorégulation à la Commission.