Malgré la mobilisation importante du monde viticole et de certains parlementaires, les députés ont confirmé le 18 décembre la suppression de l’exonération de charges sociales salariales du contrat vendanges. Un échec symbolique dont il faut tirer des leçons pour les combats à venir.
9 septembre 2014, surprise dans les locaux de la CNAOC à Paris. Un article du journal Les Echos annonce que le gouvernement s’attaque à un symbole de la viticulture : le contrat vendanges, dispositif dont est à l’origine la CNAOC. Dans le cadre du Projet de Loi de Finances (PLF) 2015, le gouvernement, à la recherche d’économies, propose de supprimer l’exonération de charges sociales salariales, atout majeur du contrat vendanges, qui permet d’augmenter le salaire net des vendangeurs. Directement, la CNAOC et ses fédérations régionales se mettent en ordre de bataille et organisent une action de lobbying à destination des parlementaires viticoles. Elles préparent un amendement de suppression et reçoivent rapidement de nombreux soutiens de députés et sénateurs de territoire viticole, y compris des membres de la majorité. « A ce moment-là, c’était du 50-50 » explique Pascal Bobillier-Monnot (PBM), directeur de la CNAOC et spécialiste du lobbying parlementaire. « Le vote de la commission des finances de l’Assemblée nous a donné confiance. » Car à la commission des finances de l’Assemblée, les arguments des vignerons ont fait mouche et l’amendement de maintien du contrat vendanges est adopté. C’est une première bataille de gagnée.
La défaite malgré la mobilisation
« C’est lors de la 1ère lecture du PLF en séance plénière que tout a basculé » raconte avec recul le directeur de la CNAOC. « Sans ce vote négatif des députés, le contrat vendanges aurait été sauvé ! » Pourtant les débats vont dans le bon sens lorsqu’est examiné l’article 47 du PLF. Plusieurs députés de tous les vignobles de France sont présents et prennent la parole pour défendre le contrat vendanges (voir ci-dessous). Mais surprise au moment du vote de l’amendement de la commission des finances, le gouvernement rappelle dans l’hémicycle des députés citadins et l’amendement est rejeté à 3 voix près. Le soutien de députés de tous les horizons politiques n’a pas suffi. C’est une défaite qui laisse un goût amer. Malgré tout, la CNAOC ne faiblit pas et maintient sa mobilisation en prévision de la lecture du texte au Sénat. Le 5 décembre, sans surprise, le Sénat, récemment passé à l’opposition, rétablit l’exonération de cotisations sociales salariales. Le combat n’est pas fini et un mince espoir renaît. Lors de la Commission Mixte Paritaire (CMP), chargée d’examiner les points de désaccords entre le Sénat et l’Assemblée, les deux chambres restent sur leur position et le texte est renvoyé en deuxième lecture. Malheureusement, l’espoir est balayé par la deuxième lecture du PLF à l’Assemblée le 12 décembre, ou seulement deux courageux députés – P. A. Martin (Marne) et M.C. Dalloz (Jura) – sur dix présents défendent et votent en faveur du contrat vendanges. Les étapes suivantes ne donnent pas lieu à des miracles. L’exonération de charges sociales salariales est définitivement supprimée le 18 décembre par l’Assemblée Nationale.
Un contexte compliqué
« Bien entendu, c’est une déception. Mais il faut remettre ce vote dans son contexte » précise P. Bobillier-Monnot. Très à cheval sur la maîtrise des dépenses publiques, le gouvernement a exercé une pression maximale sur les parlementaires, notamment sur les députés de la majorité, ce qui a compliqué la mobilisation. Pour autant, pour le directeur de la CNAOC, « il ne faut pas incriminer uniquement la majorité, car les responsabilités sont partagées. Si une partie des députés de l’opposition n’avait pas été dans le rejet systématique des propositions de la majorité et avaient soutenu l’amendement de la Commission des finances, nous aurions remporté le vote ». Autre constat, celui de l’absence du groupe d’études viticulture de l’Assemblée Nationale sur ce débat. « Si nous n’avons pas le soutien du groupe d’étude sur un sujet aussi symbolique, sur quel autre sujet va-t-il nous soutenir ? » s’interroge PBM.
Des leçons à tirer pour les combats à venir
Sur le terrain, les vignerons sont aussi frappés par le manque de courage de certains parlementaires. « Habituellement, les sujets viticoles dépassent les clivages politiques. Pas cette fois. » s’exaspère, fataliste, Bernard Farges, viticulteur à Bordeaux et président de la CNAOC. Mais le contrat vendanges a tout de même permis d’interpeller les parlementaires en prévision d’un autre débat à venir en 2015 : le projet de loi de santé publique. « Cette fois-ci, la mobilisation sera d’une autre ampleur sur le terrain. Nous n’accepterons pas les postures partisanes sur les sujets viticoles. D’autant plus qu’en face, nos adversaires seront prêts et armés ! » avertit B. Farges. « La différence se fera sur la présence et le nombre en séance plénière. Nous serons vigilants ! » Les parlementaires sont prévenus.
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